Pierre
Erny sur le site de J.Morel
la
lettre de Pierre Erny (DNA du 28 avril)
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Rwanda : « Un seul génocide »
« C'est avec stupeur que j'ai lu la
lettre de Pierre Erny (DNA du 28 avril) consacrée au Rwanda »,
nous écrit Emmanuel Cattier, président de l'association "Archives de Survie en Alsace", qui estime qu'un seul génocide a été perpétré dans ce
pays, celui de 1994 perpétré contre les Tutsi, et accompagné du massacre
des Hutu modérés.
« L'ONU, l'Union
africaine, les Parlements français, belge, rwandais, Médecins sans frontières,
Médecins du monde, Avocats sans frontières, de nombreux chercheurs,
écrivains, journalistes présents sur le terrain, tous parlent d'un seul
génocide, celui des Tutsi, accompagné du massacre des Hutu qui refusaient
la « solution finale ».
« Quota
raciste »
Qui affirme qu'il y
aurait eu deux génocides ? Les génocidaires et politiciens rwandais
du Hutu Power, des responsables militaires et politiques français, l'auteur,
certains milieux religieux, de la francophonie, de la presse, des Congolais,
soumis à la propagande des génocidaires repliés.
On ne peut pas affirmer : « ... à aucun moment de son
histoire, il n'y a eu au Rwanda un million de Tutsi... » En 1994,
il y avait 7,9 millions d'habitants. Le régime génocidaire avait limité,
par un quota raciste de 10 %, l'accès des Tutsi à l'éducation.
Ces 10 % n'étaient même pas un pourcentage représentatif, et des
parents ont soudoyé des fonctionnaires pour faire changer « l'ethnie »
sur les cartes d'identité de leurs enfants, voire sur les leurs. Il
y avait 15 % de Tutsi, certaines études disent 20 %.
« Mais le plus grave... entre 1990 et 1994, (le FPR)... a
systématiquement décimé la population Hutu (du nord du Rwanda) ».
Cette affirmation est tout simplement sans fondement, fruit d'une propagande
de l'époque, travaillant la motivation des Hutu pour le génocide. Voir
sur cette période les rapports de l'envoyé de l'ONU, M. Degni-Ségui,
publiés en juin et octobre 1994, et le rapport de référence de la FIDH
et Human Rights Watch sur ce génocide, « Aucun témoin ne doit survivre »,
publié aux éditions Karthala.
A-t-on jugé à Nuremberg les responsables des bombardements contre
les populations de Dresde, de Hambourg, d'Hiroshima, de Nagasaki ?
Personne ne nie les exécutions sommaires de génocidaires et les actes
de vengeance spontanés, parfois organisés, de l'armée du FPR. Mais les
nombres de victimes Hutu cités par l'auteur sont improbables, un zéro
de trop. La justice se construira d'abord sur le refus du génocide des
Tutsi, crime d'Etat, refus partagé courageusement par plusieurs milliers
de Hutu, dont beaucoup ont payé de leur vie leur solidarité avec leurs
frères, nés administrativement « Tutsi ».
Machiavélisme
colonisateur
Tutsi, Hutu, Twa parlent
la même langue, ont la même foi ancestrale en Imana, Dieu unique, la
même culture, vivent ensemble sur les collines. Ce ne sont pas des ethnies,
mais des appartenances socioculturelles, « racialisées » par
un machiavélisme colonisateur, manipulées ensuite par les « Hutucrates »
pour populariser le génocide.
Les Rwandais, et leurs institutions actuelles, s'efforcent de
dépasser concrètement l'ethnisme et son traumatisme post-génocidaire ».
E.C.
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