Contre toutes les occupations !
Assez de l’ingérence française en Afrique !
Un chantre du pacifisme ?
Jacques Chirac s’est
donné le beau rôle pendant la guerre en Irak, se proclamant Hérault du pacifisme
et prétendant même parler au nom de ceux qui manifestaient dans la rue. Les
choses se sont éclaircies quand on a commencé à parler de « reconstruction » :
la France a alors réclamé que cette « reconstruction » s’opère dans
le cadre de l’ONU, et ne soit pas laissée aux seuls américains. En clair,
les dirigeants français et les multinationales voulaient leur part du gâteau.
Auparavant, ils s’étaient contentés de défendre leurs intérêts pétroliers
et plus généralement commerciaux et craignaient que la guerre et l’occupation
américaine ne mettent fin à grand nombre de contrats passés avec l’ex-régime
de Bagdad…
Crimes perpétuels en Afrique
Ce que l’Amérique a fait au peuple Irakien, et que la
France a officiellement condamné, cette même France l’inflige depuis des décennies
aux peuples africains. Elle a même fait pire… (jusqu’à soutenir militairement,
financièrement et diplomatiquement les génocidaires du Hutu Power au Rwanda
en 1994.) Pour les mêmes raisons que les américains en Irak : pillage
des richesses, positionnements « stratégiques », le tout rebaptisé
« Raison d’Etat », « Secret Défense » voire « missions
humanitaires » (comme lors de la guerre du Biafra ou lors de « l’Opération
Turquoise » visant à sauver les génocidaires rwandais). L’impérialisme
français semble moins connu que son puissant voisin américain… du moins dans
nos frontières. Et ça n’est pas sans rapport avec le mutisme prudent des médias
et de la classe politique française sur les « affaires africaines ».
Terrain réservé de l’Elysée depuis le Général de Gaulle jusqu’à Chirac, en
passant par Giscard et Mitterrand. Même l’Assemblée Nationale ne contrôle
ni le budget réel des opérations militaires en Afrique, ni les mouvements
des troupes, et à plus forte raison leurs agissements, surtout quand ils peuvent
être qualifiés de crimes contre l’humanité (raison pour laquelle la France
s’est opposée à ce que la Cour Pénale Internationale
puisse poursuivre ses militaires), comme au Congo-Brazzaville en 1998
ou au Tchad en 1997 au plus fort de l’épuration ethnique. Cela ne signifie
pas pour autant que nos parlementaires ne soient pas au courant… mais peu
nombreux sont ceux qui ont le courage de s’y opposer. Sans parler de ceux
qui y ont tout simplement intérêt…
Manœuvres militaires
Depuis la période des indépendances,
l’armée française est restée la principale force militaire d’Afrique. Armée
d’occupation ? Sans aucun doute. La France a noué avec ses anciennes
colonies des accords de « coopération » notamment militaires. Sous
couvert de « protection » apportée aux pays Africains, l’Etat major
de l’armée française supervise la formation, le recrutement et parfois même
la direction de nombres d’armées africaines, et des « Gardes Présidentielles »,
milices chargées de faire régner la terreur et de prévenir d’éventuels coups
d’Etat. Ainsi, même quand l’armée française n’est pas officiellement
présente (il y a toujours quelques barbouzards et des militaires déguisés
en mercenaires en mission qui traînent…), elle peut faire de la sous-traitance…
C’est ainsi que Sassou N’Guesso, le tyran du Congo-Brazzaville et homme de
main d’Elf, est officiellement remis en celle par l’armée angolaise en 1997.
Une armée que les réseaux Pasqua-Marchianni venaient de gaver d’armes russes
(affaire de l’Angola-gate), et qui est aidée par des contingents Tchadiens
(pré-carré français) et des restes des forces rwandaises (celles qui avaient
commis le génocide en 1994 et que la France avait protégé jusque dans la défaite).
Le tout financé par Elf. Le pétro-dictateur angolais sera chaudement remercié
par Jacques Chirac, alors que Jospin couvre la politique africaine de l’Elysée
au Congo-Brazza. Un exemple récent parmi d’autres…
Indépendances confisquées
Les indépendances
ont officiellement été célébrées voici des décennies… et pourtant le peuple
africain n’a toujours pas le droit de choisir ses dirigeants. Ceux-ci sortent
plus fréquemment de l’Ecole Militaire Française (ou même directement des services
secrets français comme Omar Bongo, dictateur du Gabon), que de la société
civile africaine. Quand la corruption de la classe politique ne suffit pas,
la France aide à truquer les élections (les réseaux RPR puis UMP qui gravitent
autour de la mairie de Paris ont du savoir-faire en la matière…) : plus
de 50 des derniers scrutins majeurs dans les ex-colonies francophones ont
ainsi été falsifiés. Juqu’à la très récente ré-élection sur fond de terreur
d’Eyadéma au Togo (40 ans de pouvoir depuis qu’il a, sur ordre de l’armée
française, abattu le président légitime Sylvianus Olympio en 1963), élection
que même l’Union Européenne n’a pas osé cautionner, mais que, Jacques Chirac,
lui, n’a pas hésité à saluer. La compagnie des criminels contre l’humanité
ne le dérange pas, tant qu’ils servent les intérêts de nos entreprises, tant
que tout ceci se déroule loin de l’opinion française, et tant qu’ils se montrent
obéissants…car l’idéologie coloniale reste la norme.
Quand la corruption et les scrutins truqués ne suffisent plus,
ou quand les dirigeants africains se montrent moins dociles, alors on lâche
la bride aux mercenaires : coups d’Etat (comme aux Comores en 1978 et
1989), guerres « civiles » (comme très récemment en Côte d’Ivoire)…
On a même retrouvé dans les coffres d’Elf une proposition écrite de la multinationale
pétrolière pour éliminer les opposants politiques de Sassou N’guesso lorsqu’il
fut (provisoirement) évincé par Lissouba.
Ce que la France demande
aux dictateurs africains est simple : qu’ils laissent piller les richesses
africaines par les entreprises et multinationales françaises, qu’ils ne se
montrent pas avares de cadeaux personnels ou de financements pour les campagnes
électorales... Au premier plan, le pétrole (Elf, aujourd’hui Total), les minerais
riches, la construction (Bouygues), les forêts (Bolloré), mais aussi la privatisation
des services publics africains, avec des effets sociaux dramatiques qui creusent
encore les inégalités et enfoncent des pans toujours plus larges des populations
dans la misère, privées du droit à la santé, à l’éducation, et exposées à
la résurgence de toutes les maladies (que les firmes pharmaceutiques « aident »
à soigner en revendant leurs stocks de médicaments périmés…). Le procès Elf
aura également montré que l’Afrique est également une gigantesque caisse noire
pour les réseaux politico-financiers et militaires françafricains. Formidable
zone de non-droit, tous les trafics y sont possibles et s’y croisent joyeusement
(matières premières, armes, drogues, pierres précieuses), même si pour maintenir
l’opacité il faut plonger des régions entières dans la terreur, comme au Libéria
ou au Congo-Kinshasa et beaucoup d’autres pays déjà cités.
Contre tous les impérialismes, contre
toutes les occupations
Si nous devons nous
opposer à l’impérialisme américain, ce n’est pas pour exiger un « monde
multipolaire » comme disent nos technocrates, c’est-à-dire un monde où
s’affronteraient de plus en plus violemment des grandes puissances (Amérique,
Europe, Japon) ; où la guerre tout court succède à la guerre économique ;
où la barbarie déferle sur la civilisation. Cette barbarie-là est déjà présente
quand les grandes puissances s’affrontent par « petits » pays interposés.
Mais trop peu nombreux acceptent de la voir en face et dénoncer les responsabilités,
surtout quand elles se cachent au cœur des institutions républicaines françaises.
Si nous dénonçons
l’impérialisme américain, c’est au nom de la lutte contre tous les impérialismes,
et par solidarité avec tous les peuples opprimés. Refuser la mondialisation
libérale implique de se débarrasser également de ses bras armés… Dénoncer
tous les prétendus accords de coopération, interdire les ingérences de l’armée
française en Afrique, mettre en place une réelle législation contre le mercenariat,
interdire les paradis fiscaux, lutter réellement contre les trafics et la
corruption ; bref en finir avec la Françafrique et laisser enfin les
peuples africains décider de leur avenir.
Marseille, le 27 septembre 2003