SANS PAPIERS en lutte

>>>coordination nationale

Lettre Ouverte à Chirac, Raffarin III et à De Villepin

Monsieur le Président,

 

Tirant les leçons des régionales 2004 qui ont été un désastre politique pour l’UMP et le gouvernement Raffarin II, vous avez déclaré que « vous avez entendu et compris » et vous avez annoncé des mesures rectificatives et appelé au dialogue. Permettez nous de vous faire remarquer qu’il y a eu un oubli en ce qui nous concerne les sans papiers en lutte depuis 8 ans pour le droit de vivre dans la dignité avec nos familles.

M. Chirac, les Sans Papiers se souviennent qu’en date du 16 janvier 2002 vous répondiez à notre carte de vœux de bonne année : « Votre amical message à l’occasion de la nouvelle année m’a beaucoup touché. Je vous en remercie chaleureusement et vous prie d’accepter les vœux très sincères que je forme à votre intention et à celle de tous les vôtres pour une année de bonheur et de paix ».

Après le « tremblement de terre » du 21 avril 2002, nous les sans papiers sommes mobilisés avec l’ensemble des forces démocratiques pour barrer la route du pouvoir à l’extrême droite dans la rue, puis les citoyens français à 82% ont transformé l’essai dans les urnes le 5 mai. Là encore nous avions dans nos cœurs meurtris par la vie impossible de sans papiers un colossale espoir qu’enfin la solution attendue arrivait.

Mais pendant que les politiques se durcissaient contre nous dans le pays Berceau des Droits de l’Homme, nous avons observé qu’en Italie, M. Bossi et M. Fini, dont l’appartenance à l’extrême droite n’est un mystère pour personne, initiaient une politique qui a régularisé plus de 600.000 sans papiers. Objectivement le résultat de la négation de notre droit à l’existence légale, c’est un « 21 mars 2004 à l’inverse du 21 avril 2002 ».

Et pourtant de l’ONU, à l’OCDE, du Ministère du Plan, du Conseil Économique et Social aux instituts d’études démographiques, tout le monde s’accorde pour dire qu’il y a déjà et qu’il y aura un besoin de millions d’immigré(e)s pour les pays comme la France. Comme on peut le constater la contradiction flagrante entre ce besoin et les politiques répressives que nous ne cessons de subir quel que soit le gouvernement en place depuis 1996 ne profite qu’à l’extrême droite. L’amalgame entre le droit à une vie digne pour lequel nous nous battons et la politique sécuritaire prônée est injuste, illégitime et fait le lit des forces obscures anti-républicaines.

Permettez nous de constater que le fondateur du gaullisme, courant politique dont vous vous réclamez l’avait parfaitement compris lui qui faisant appel massivement à l’immigration pour reconstruire le pays après la guerre déclarait : « Aux soldats de la première armée française qui, devant l’HISTOIRE ont payé le PRIX DE LA LIBERTE. La France pourrait-elle oublier cette armée d’AFRIQUE qui réunissait les Français libres, les Goumiers et les Tirailleurs Marocains, Algériens, Tunisiens, Sénégalais, les soldats des territoires d’outre-mer, les évadés de France par l’Espagne, les anciens de l’armée d’armistice et des chantiers de jeunesse. La France pourrait-elle oublier ces 250.000 hommes auxquels…, vinrent s’amalgamer les 150.000 volontaires des Forces Françaises de l’Intérieur. La France pourrait-elle oublier que cette armée a libéré le tiers de son territoire et que, sans elle son Chef n’aurait pas été à Berlin le 8 mai 1945 pour signer l’acte de capitulation de l’Allemagne. Pourrions nous accepter que nos cimetières où se mêlent par milliers, les croix chrétiennes, les étoiles juives et les croissants de l’islam, soient ensevelis sous l’oubli et l’ingratitude » (Charles De Gaulle).

Les Sans Papiers ont contribué à la victoire contre la menace fasciste par leurs luttes démocratiques, par leur mobilisation citoyenne et par la mise en avant des valeurs républicaines et de l’exigence du droit à la dignité. Nous n’avons cessé de l’exprimer dans toutes nos manifestations, notamment avec les jeunes dans la dernière période: « Cette lutte est pour toi, cher français, mais toi tu ne le savais pas toujours - Nous ne sommes pas dangereux, mais nous sommes en danger - C’est pas les immigrés, c’est pas les Sans Papiers, c’est Le Pen qu’il faut virer ». En effet il est faux et dangereux pour toute la société, comme la menace lepéniste vient encore de le montrer, de faire croire que les Sans Papiers, les immigrés sont responsables de la misère, du chômage, de la délinquance et de l’insécurité.

Comptant sur une prise en compte et restant vigilants, recevez, M. le Président, nos respectueuses salutations.

Fait à Paris le 03 avril 2004