Nous avons vu Hôtel Rwanda en avant première, en France, à Strasbourg.
Ce film est sans ambiguïté sur la question ethnique. Il montre le manque de fondement de
l'ethnisme. Il donne une vision de l'ambiance pendant le génocide. Il montre qu'on
appelle les Français pour intervenir auprès des Forces Armées Rwandaise, à qui il vendent
des armes, pour qu'elles empêchent les Interahamwe de se livrer à un massacre. Il montre
la faiblesse matérielle de la Minuar et la lâcheté des grandes puissances. Dallaire
devient Colonel... mais s'il lui ressemble il ne s'appelle pas Dallaire. Il présente ce
Colonel "Olivier" comme un archétype de casque bleu. Il donne une image presque
sympathique de Bizimungu en alcoolique fréquentable. Il montre les limites des milieux
journalistiques. Enfin ceux qui ont des préoccupations plus mélo seront passionnés par
l'histoire de la famille "hutu/tutsi" de l'hôtelier, Paul Rusesabagina, qui est un
excellent antidote contre la bêtise ethnique.
Ce film est évidemment limité si l'on veut avoir une vision d'ensemble de ce génocide. La
question de la planification est juste suggérée, et le spectateur qui ne connait rien du
génocide ne la percevra peut être pas. Aucune date pendant ces cent jours. On entre dans
un tunnel temporel, c'est un coup de zoom historique où tous les plans historiques se
rapprochent. Une fenêtre est ouverte sur un événement de l'humanité qui ne laissera
personne indifférent.
Aucun décideur politique n'est visible dans le film, qu'il soit Rwandais ou étranger.
Seul l'évocation indirecte d'une intervention ponctuelle française en faveur des protégés
de Paul Rusesabagina est connue... mais elle montre par défaut ce qui aurait pu être fait
par la France.
Pour le débat que nous avons animé ensuite, nous n'avons eu aucune difficulté à rattacher
les allusions du film à leurs prolongements historiques si ce n'est l'absence de
repérages temporels. En résumé c'est un produit honnête qui peut amener le spectateur à
creuser la question. La violence est très présente, mais le stress du spectateur est très
bien managé. Elle suggère certainement ce qu'ont pu percevoir les 1200 réfugiés de
l'Hôtel et souligne qu'il y a pire autour à travers les journalistes filmés et les
quelques déplacements du directeur de l'Hôtel à travers Kigali.
Par contre le dépliant quatre pages sur papier glacé, distribué dans les salles, commis
par les milieux professionnels du cinéma, qui ?, est d'une médiocrité dangereuse. On a
l'impression que l'on a demandé au Quai d'Orsay de faire le dépliant. Il est bourré
d'erreurs de dates. La bibliographie est DGSE. Il donne des conseils (sur une page) pour
chaque niveau scolaire pour parler de thèmes évoqués dans le film. Mais on évite
soigneusement de suggérer une réflexion sur l'engagement français. Il faudrait que des
profs revoient cette page et qu'on publie un contre quatre page. Voir ci-joint le scan du
document.
EC. 2005
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